Marins Français sur le Porte-Avion Lafayette en mai 1953

Cigares Mlia

Une Renault Dauphine dans une rue de Saïgon

Sagonnaises sur les trottoirs de Saïgon

Camionnette Renault avec une saïgonnaise

Les fameux taxis Renault 4CV

Cyclistes devant l'Hôtel Continental de Saïgon

Htel Majestic Sagon

Le Boulevard Charner

Devant le Parlement Novembre 1963

Opticien Michaux Saigon

Le Docteur Irwin S. Leinbach devant le Parlement Novembre 1963

Rue Catinat

Eden Sports Saïgon

Rue Catinat

Le Baccara rue Catinat Saïgon

Le Palais de la Capitale du Sud-Vietnam

Centre ville de Saïgon

Au Printemps Saïgon

Cathedrale Notre Dame Saigon

Continental Hotel Saigon

La Poste de Sagon

Garage Jean Comte 34 Boulevard Norodom Saïgon

Societé Indochinoise de Transports Saigon

Htel Continental Cyclomoteur Mars 1951

Air France

Ford Vedette Saïgon

Hotel Caravelle Saïgon

Une Renault Dauphine dans une rue de Saïgon

Camions Cosara de Sagon

Hôtel de Ville de Saïgon

Colette et son velosolex devant le Cafe Givral Saïgon

Enfants dans une rue de Saïgon

Croix-Rouge Française rue Thevenel

Cathedrale Notre Dame Saigon

Htel Continental Taxi Renault

Etablissement Lucien Berthet Catinat Saïgon

Citroen DS19 devant le temple Vinh Nghiem

Renault 10 Vietnam Cong Ty Saïgon

Renault Fregate & Citroen Traction Saïgon

Jeunes gens en 1967 avec des Mobylettes à Saïgon

Confection Tailleur Coya Saïgon

Peugeot 404 devant le Thtre

Carrefour du Centre Ville de Saïgon

Cigarettes Mic Extra Cholon

Palais de Justice de Saïgon

Peugeot 404 devant le Thtre

Couple Français devant le Café Le Givral Saïgon

Peugeot 203

Taxi Renault 4CV Station-Service Schell



Cinema Bonard Saïgon

Garage Charner Saigon

Renault 4CV & Dauphine Boulevard Charner Saïgon

La terrase d'un café de Saïgon

La Rue Pasteur ex Pellerin Sagon en 1965 Velosolex Mobylettes

Cigarettes Melia

Vue sur Sagon depuis l'htel Caravelle

Grands Magasins Charner Saïgon

Peugeot 203 sur le Boulevard Bonnard à Saïgon

Carrefour Renault-Dauphine Volkswagen Coccinnelle Saïgon

Air France Dunlop

Cathédrale Notre-Dame Saïgon

Hôtel Continental de Saïgon vu de la rue Catinat

Sagonnaises sur les trottoirs de Saïgon

Peugeot 203

Saïgon-Paris à scooter Peugeot en 1957

Marin vietnamien sur un Vélosolex à Saïgon

Souvenir de Sagon

Indochinoises en vlos

Jeux dans les rues de Sagon

Jeunes gens en 1967 avec des Mobylettes à Saïgon

En Solex 2200 à Saïgon

Reine Pédauque Saïgon

Place Pigneau de Behaine et la Cathedrale de Saigon

La Croix du Sud rue Catinat Saïgon

Marché noir Cigarettes Novembre 1967

les Messageries Maritimes ont fait le tour du monde

Boulevard Charner Sagon

Carrefour du Centre Ville de Saïgon

En 1950 le Boulevard Charner Saïgon

Thtre municipal de Sagon

Saigon-Garage Simca

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Drapeau anglais

SAÏGON DANS LA GUERRE
Par Fernand Gigon

CONNAISSANCE DU MONDE

Connaissance du Monde

L'article présenté ci-dessous a été publié dans le mensuel Connaissance du Monde n° 111 du mois de février 1968.
Fernand Gigon nous fait apparaître l'atmosphère de la guerre à Saïgon dans les bars et dans les rues. Dans ces lignes, il évoque, d'une plume précise, objective, incisive, en une série de petits tableaux saisissants dans leur sobrieté, la dure vie journalière des habitants de Saïgon, ville survoltée où la bagarre risque toujours d'éclater, n'importe quelle provocation pouvant déclencher une émeute, où l'occupant est haï et exploité, où règne une déchéance morale sur tous les plans, engendrée par les terribles conditions d'une guerre sans fin.

Fernand Gigon, journaliste suisse, a travaillé alors pour des dizaines de journaux du monde entier. Il a voyagé en Extrême-Orient, en a rapporté des livres, des articles, des photos, des reportages pour la radio. Il fut l'un des premiers journalistes étrangers à visiter la Chine communiste en 1956. Après des voyages en Afrique (Guinée), il retourna en Chine en 1961 et a tourné des documentaires pour la chaîne américaine NBC. En 1968 il sera le témoin suisse indépendant du conflit vietnamien.
Ses archives (ses écrits et plus de 20.000 photographies) ont été offertes par sa veuve à la Bibliothèque cantonale jurassienne à Porrentruy.

Vue aérienne de Saïgon en 1968

Vue aérienne de Saïgon

A Saïgon, l'histoire se lit dans la rue. La capitale meurt et renaît avec chaque mousson. Avec sa campagne inondée et son ciel enfin purifié, chaque saison elle comptabilise ses succès et ses échecs en une seule formule : quoi de nouveau depuis l'an passé ?
D'abord et en premier lieu, une haine générale à l'égard des Américains. Trois, quatre pour cent, peut-être cinq, de la population se déclarent enchantés de leur présence. Et les autres ? De l'hôtesse de bar au secrétaire de ministre, en passant par le coolie-pousse et la dactylo de l'admnistration, tous, unanimement, crachent leur haine sur l'occupant et essaient d'en profiter. A aucun moment, ils ne pensent qu'il se bat pour eux, pour leur "liberté de choisir leur genre de vie" comme le dit la propagande made in U.S.A.
Un coolie-pousse, m'entendant parler le français, me tape sur l'épaule et montre un groupe de soldats U.S., debout sur le trottoir : "Pas gentils, les Américains, eux savoir seulement faire pan, pan, pan sur les Vietnamiens". Et du haut de sa selle, il imite un G.I. déchargeant son fusil mitrailleur.
Une fille de bar m'explique : "Heureusement qu'ils sont ivres, quand on sort avec eux : ils ne savent pas même pas ce qu'ils font."
Un haut fonctionnaire : "Avec nos 5.000 piastres par mois, on est juste bon pour ne pas crever de faim : avant les Américains, la vie était moins chère..."
Toute la journée les mêmes plaintes, confites dans le mépris et dans le ressentiment. Cette haine ne se transforme pas encore en agressivité, mais est assez vive pour empoisonner l'existence. Les permissionnaires américains de la base de Bien Hoa ne sont pas autorisés à descendre à Saïgon, sauf en petits groupes.
Un Vietnamien me disait : "Qu'il en arrive un ou deux bataillons à la fois et la bagarre éclate : personne ne sait quand et où elle s'arrêtera."
N'importe quel prétexte, n'importe quelle provocation peut faire couler le sang.

Manifestation dans les rue de Saïgon Lavage taxi Renault 4CV

Sur la photo de gauche un cortège se forme dans un parc de la ville. Il groupe des manifestants appartenant aussi bien au monde de l'admnistration qu'au peuple des paysans. On peut lire des protestations contre l'empoisonnement des rizières, contre la défoliation et contre la politique U.S. au Vietnam.

Parfois une pancarte apparaït dans le quartier commerçant. Elle dit carrément : G.I. go home.
Dès qu'une main inconnue l'a déposée là, les Vietnamiens font le vide autour d'elle, mais il se trouve toujours un dénonciateur pour alerter la police. Deux agents arrivent à bicyclette, enquêtent en vain et vont faire leur rapport en emportant l'objet en délit.
Parfois d'autres pancartes voguent au-dessus de cortèges de manifestations. Elles disent : "Cessez les bombardements inutiles ! Assez de poison sur nos champs de riz ! Assez de défoliations !". Ces pancartes écrites en vietnamien et en anglais, portées par des militants syndicalistes par exemple, se promènent entre deux haies de gendarmes en civil et en uniforme.
Un cortège se forme dans un parc de la ville. Il groupe des hommes appartenant aussi bien au monde de l'administration qu'au peuple des paysans.
Cette longue théorie de manisfestations passent toujours vers la rue Tu Do (anciennement Catinat) puis redescendent par le boulevard Lê Loi (anciennement boulevard Bonnard). Ils ne manquent pas de s'arrêter devant les bâtiments de l'Information américaines et parfois une poussent une pointe vers l'ambassade U.S.
Impassibles, les marines les regardent défiler. Simplement le cran de sûreté de leur fusil ou de leur mitraillette a été dégagé.

Patrouille de Police dans Saïgon Manifestation sud-vietnamienne

Le Gouvernement joue avec ces manifestations. Il les tolère dans la mesure où il a une demande à adresser aux Américains ou une pression à exercer pour faire pleuvoir des dollars. Les prostestataires utilisent ces pancartes pour compenser le poids de leur mécontentement. Mais le public, assez clairsemé, qui stationne sur les trottoirs et laisse s'écouler le flot des manifestations, n'est pas dupe. Il sait très bien que le Gouvernement, à ce moment, fait marcher la soupape de sûreté. Le Gouvernement autorise ces manifestations à l'esprit anti-américain et s'en sert pour permettre aux mécontents d'exposer leurs revendications

La rue des voleurs (Thuc Khang)

La rue des voleurs Saïgon La rue des voleurs Saïgon

Sur la photo de gauche prise par Fernand Gigon : Au centre de Saïgon, une rue vient de changer de nom : elle se nomme la rue des Voleurs ou la rue du PX. Les "marchands" y vendent tous les produits américains qui ont été "volés" lors du déchargement des bateaux américains qui apportent leurs produits de consommation.
Sur celle de droite les boutiques des marchands sous des bâches.


Il n'est pas dupe non plus de la sincérité des dirigeants quand ceux-ci tonnent contre les spéculateurs, les animateurs du marché noir et les fournisseurs de piastres dévaluées. Car dans la vie pratique, ce genre de menaces ne dépasse pas le Palais de la Présidence. Pour s'en convaincre, il suffit au Vietnamien de franchir 500 mètres. Cette distance du Marché où s'élèvent, droits comme des I devant une forteresse de sacs de sable, quatre poteaux d'execution, de la rue Thuc Khang, vulgairement appelée rue des Voleurs. Ils doivent servir d'avertissements permanent aux spéculateurs.
Les poteaux symbolisent l'autorité, le marché la nie. Un seul chinois, spéculateur en riz et milliardaires en piastres, a été traîné devant les poteaux d'exécution et fusillé au cours d'une dramatique démonstration de mauvaise justice. Les prostestations, à la suite de cette condamnation, ont été si violente que les fraudeurs, aujourd'hui, ne risquent plus que la prison et l'amende.
Quant à la rue du Marché noir, elle exhibe ses marchandises volées, comme une fille de rue décorsetée montre ses charmes. Sur les trottoirs, de petits fortins composés de boîtes de conserves, de bouteilles, de paquets et de cartons se font face. La majorité des produits ainsi portent le label américain, sauf les montres qui sont suisses, les cognacs qui sont français et les transistors qui sont japonais. Ici échoue la marchandise volée sur le port ou rachetée aux G.I.'s.

Vendeuse de Cigarettes et de Chewing-Gums Divers produits en vente dans le marché aux voleurs Divers produits en vente dans le marché aux voleurs

Dès le matin à l'aube - car le Vietnamien est un lève-tôt - et jusqu'à 8 heures du soir à la lumière de phare-tempête, une foule de marchandes piaillardes et d'enfants aux yeux brillants s'installent sur le trottoir et vendent les produits volés au port, mais destiné à l'armée américaine. Les bouteilles de whisky à 600 piastres restent les vedettes de cet immense marché noir au travers duquel passent et repassent en silence les patrouilles d'agents vietnamiens, vêtus de blanc et totalement indifférents à l'indécence de ce trafic.
Un Français qui attendait un envoi de produits pharmaceutiques m'expliquait avec résignation :
"Je viens d'apprendre par un de mes employés qu'on ne trouve plus trace de mes importations, ni au port, ni à la douane. Or, j'ai la preuve qu'elles ont été déchargées du bateau. Il ne me reste qu'à offrir une prime pour récupérer mon bien. Toutes les maisons de Saïgon connaissent ces fourches caudines. Il disparaît des camions entiers de marchandises. On les voit arriver à vide sur les quais. Des coolies les chargent sous l'oeil des douaniers et de la police, mais ils n'arrivent jamais à destination. Sauf si on paie de grosses primes à des intermédiaires. Certains prétendent que ces disparition subites sont contrôlées par le Vietcong. Si cela est, il faut en conlure que toutes les structures du pays sont gangrenées, pourries jusqu'à l'os".
C'est aller chercher un peu loin ce que chaque curieux peut observer lui-même. Somme toute, le marché des voleurs, c'est la réplique du PX américain, magasin où les soldats U.S. peuvent acheter à très bon compte les produits de consommation courante. Entre le PX et le marché, il y a 800 mètres. Sur ce parcours on croise de solides G.I.'s, les bras encombrés de paquets. Ils sortent des magasins de l'armée, chargés de whisky, de cigarettes, de remèdes, de chaussettes ou de tubes de pâte dentifrice.
Ils les revendent dans l'arrière-salle de quelque bistrot, puis s'en vont courir les filles. Celles-ci, armées de fausses fesses et de faux seins, made in Hong-Kong, se chargent d'éponger immédiatement les superbénéfices réalisés par les soldats dans leur petit trafic.

New-York Bar Saigon Vendeuse Cigarettes Saigon

Parfois, dans cette rue encombrée de marchandises, des membres de la M.P. (Military Police) croisent des agents de la police vietnamienne. Ils ne regardent pas, ne se voient pas, trop occupé à lorgner du côté des bouteilles de Champagne à 800 piastres la bouteille, des flacons de parfum et des boîtes de conserves.
Les boueurs de la municipalité de Saïgon, quand ils passent le balai dans les caniveaux de ce marché, eux aussi, louchent du côté de la bouteille. Mais leur tentation ne va pas loin car, en bons Vietnamiens qu'ils sont, ils n'ignorent rien du mystère de l'addition. Ils s'aperçoivent aussitôt que leur salaire mensuel ne suffirait pas même à se payer une bouteille de whisky et une bouteille de Champagne. Le résultat ?
Jamais Saïgon n'a été aussi sale.
Les boueurs laissent s'accumuler sur les trottoirs des tas de légumes et de fruits qui empuantent l'atmosphère. Des vers, des insectes grouillent partout. L'explication de ce laisser-aller est simple : les boueurs sont mobilisés dans l'armée sud-vietnamienne et ceux qui restent ne touchent en un mois même pas de quoi passer une nuit dans une chambre climatisée d'un des palaces de la capitale.
Des tas d'ordures pourissantes font partout le gros dos. Les rats y grouillent et se creusent des tunnels à travers ces monticules nauséabonds.
Même la mousson, en dépît de sa violence, n'arrive pas à évacuer ces immondices.
Cette saleté, jetée en vrac dans les rues de Saïgon, joue à la perfection un rôle de symbole. C'est le pays entier qui s'enfonce progressivement dans une déchéance morale sans pareille.

Peugeot 203 & Cyclo-Pousse Mobylette et Peugeot 403

Le pourissement du Vietnam atteint tous ses organes. Les affaires de concussions, les passe-droits, les avantages achetés au détriment de la justice, formeraient un catalogue complet de la bassesse humaine. Au hasard de ce sommaire, voici quelques échantillons : mille dollars américains pour obtenir un passeport avec de visa de sortie ; achat clandestin de villas en Espagne et d'appartements en France ; un million de dollars sortis en contrebande par les "grands" du pays en dix mois et convertis en investissement à l'étranger ; recrutement intensif de jeunes filles de la campagne destinées au repos du guerrier ; ouverture de deux cents maisons spéciales, ou plus exactement appartements spéciaux, où revit l'histoire de Sodome et Gomorrhe.
Rarement une guerre a secreté autant de vices en si peu de temps. Les églises américaines s'en soucient et envoient des commandos d'enquêtes et de vertus sur ce terrain élu de l'immoralité.
Les Vietnamiens eux-mêmes, dans leurs plaintes aux autorités, évoquent ce problème. A l'escalade de la guerre, correspond l'escalade de la déchéance.
Saïgon est devenu "le plus grand bordel du monde", ainsi que le disait un sénateur américain.

La mousson dans les rue de Saïgon Boutique Saïgon

Usage de la psychologie

Les américains se rendent compte de cette marée de haine qui les entoure et un jour risque de les submerger. Leur section psychologique vien d'envoyer dans le delta du Mékong des groupes de spécialistes pour interroger les villageois, ou ce qu'il en reste, victimes d'un napalmage. Les conclusions de cette Commission sont réellement ahurissantes : elles tendent à prouver que les nha-qués du Sud-Vietnam ne sont pas mécontents, qu'ils se nourrisent nul ressentiment à l'égard des Américains car, dit le rapport, "ils comprennent pourquoi, dans notre lutte contre les agresseurs communistes, nous sommes obligés d'utiliser tous les moyens de destruction mis à notre disposition". Dans leur recherche éperdue de justification, ces spécialistes oublient peut-être que des Asiatiques aussi polis que des Vietnamiens ne diront jamais un mot, une phrase qui puissent déplaire, surtout s'il s'agit de ces "grands nez" d'Américains, distributeurs de riz, de médicaments et de paillotte.
A mesure que l'escalade monte sur ses sommets, le nombre de mutilés et d'estropiés augmente. On les voit dans la rue traînant leurs moignons de membres à moitié dévorés par le napalm ou boîtant bas, béquille à l'appui.
Ils sortent parfois en groupe et s'asseyent sur l'escalier d'un cinéma, pour voir passer devant eux l'ahurissant défilé des Saïgonnais. Ils ne restent à l'hôpital que le minimum de temps, car chaque jour apporte un nouveau contingent de blessés, militaires ou civils.

Atelage dans les rue de Saïgon Transport motorisé de canard

Pour charger un bateau dans la rivière de Saïgon qui sert de port à la capitale, il faut au moins une semaine. Les quais sont tellement encombrés de marchandises que les camions n'arrivent plus à les évacuer, ce qui permet un vol permanent, un pillage invraisemblable.
Le racket fleurit. Priorité est donnée aux bateaux qui amènent à Saïgon des munitions et des armes. Ils s'occupent toute la longueur utilisable des quais de déchargements. Les autres bateaux qui apportent par exemple de la nourriture ou des matières premières de plus en plus nécessaires au pays, jettent l'ancre au mileu du fleuve et leur cargaison est déchargée au ralenti : caisse par caisse sur de miniscules sampans qui échappent aussi bien au contrôle des douaniers que de la police. Pour compliquer la situation, souvent le Vietcong fait sauter des chalands au mileu du fleuve et bloque tout mouvement pendant plusieurs jours.
De plus en plus souvent, des villages sud-vietnamiens sont attaqués aveuglément par l'aviation américaine qui pense ainsi en déloger les partisans vietcong. Le Général Westmoreland, dans un récent rapport, parlait de quatre cent soixante attaque par erreur. Dès que les avions U.S. ont regagné leur base, les notables des villages sortent de leur coffre de santal leur tunique noire, s'en vêtent et partent à Saïgon demander aux autorités américaines des indemnités. Leur apparition dans une capitale vouée au commerce et à la guerre crée toujours une petite sensation. C'est un peu de passé qui surgit dans le siècle de fer et de feu.

Mobylettes et motos dans les rue de Saïgon Dalat Citroën, cyclomoteurs Saïgon

Construction et barricades

Quand un voyageur arrive à Tan Son Nhut, l'aérodrome le plus actif du monde, une charmante hôtesse lui demande s'il a réservé une chambre. Si oui, une fois sur deux la chambre lui aura été "soufflée" par un voyageur précédent qui aura payé une prime de 20, voire de 30 dollars à un concierge d'hôtel afin de s'assurer un gîte pour la nuit.
Sinon il échouera avec beaucoup de chance dans un minable hôtel plus propice à l'élevage des cafards qu'aux rêves d'un sommeil paisible. Même problème pour les appartements. Ce fait n'a pas échappé aux Vietnamiens, qui construisent, comme des damnés, des hôtels qu'ils qualifient de palaces, et des appartements en transformant leurs poulaillers. En deux ans, le capital investi doit-être récupéré, ce qui faisait dire à un banquier chinois de Hong-Kong que "Saïgon était la ville du monde où on faisait le plus vite fortune".
Il y a une année, seuls les bâtiments habités par les Américains étaient protégés par des sacs de sable. Aujourd'hui, il y en a un peu partout.
Les membres du gouvernement qui craignent l'action des rebelles font dresser des barricades autour de leur ministère : les Américains les imitent et entourent leurs installations techniques et surtout leurs groupes électrogènes d'une véritable muraille de protection. Le terrorisme règne sur la ville et une faiblesse dans la protection se traduit tout de suite par un attentat à la grenade.
Les réfugiés : dans le sud du Vietnam, ils sont près d'un million à vivre loin de leur village et de leurs champs. Le napalm, les gaz BZ 7, les produits chimiques qui provoque la défoliation, les attaques aériennes des B 52, les ont chassés de leurs terres. Pauvres et dénudés, parmi les plus miséreux, ils vivent en marge des villes ou des hameaux reconstruis à leur usage. Sans contrôle, sans hygiène, ils deviennent facilement les victimes et les proies des maladies.
D'après les estimations les plus vagues, 70 % de la population est bouddhiste. Ce chiffre, il faut l'expliquer. Dans toute l'Asie, aucun pays ne pratique aussi peu le boudhisme que le Vietnam, mais aucun pays n'en subit si fort l'nfluence. C'est sur les esprits bien plus que sur les âmes que s'excerce la hiérarchie bouddhique. Elle est représentée dans tous les villages même les plus perdus dans les rizières ou les montagnes. Il suffit qu'un mot d'ordre vienne des hauts "vénérables" pour qu'il se répande aussitôt partout.
Au Vietnam, le bouddhisme est sorti des pagodes pour decendre dans la rue.

Notables villageois dans Saïgon Les victimes de la guerre Les mendiants dans les rues de Saïgon

L'escalade s'accentue. Les notables des villages viennent demander des indemnités, le nombre des estropiés augmente ; devant les mendiants, les passants...ferment les yeux.
Texte et photographies de Fernand Gigon
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